mardi 10 novembre 2015

Des objectifs et une méthode pour moderniser notre droit du travail




Moderniser le droit du travail : tout le monde reconnaît que c’est nécessaire, mais personne n’a jamais eu le courage d’engager cette réforme. Ce gouvernement y est décidé. Parce qu’aussi complexe et sensible que soit l’exercice, il ne peut plus être encore reporté.

Nous prenons donc nos responsabilités, en enclenchant un utile mouvement, qui permettra à son terme de rendre le code du travail plus lisible, plus clair et donc plus protecteur.  

Le chantier qui vient d’être engagé poursuit un double objectif. Il s’agit d’abord de répondre à un enjeu de compétitivité pour nos entreprises et donc de création d’emploi. Par les empilements successifs de dispositions, notre législation et notre réglementation sur le travail constituent aujourd’hui un frein. Le nier, c’est refuser de regarder la réalité en face. Il convient donc de faire sauter certains verrous, en particulier pour les TPE et les PME pour lesquelles la complexité du droit du travail constitue un puissant motif de renoncement à l’embauche.  

Davantage de souplesse doit être donnée aux acteurs du monde économique, dans toute leur diversité, en précisant de manière plus explicite ce qui relève des droits et des obligations qui s’appliquent à tous les salariés et à toutes les entreprises et ce qui doit procéder d’accords de branches, par ailleurs simplifiés.

Réformer le droit du travail, ce n’est pas pour autant, comme certains le redoutent ou d’autres le voudraient, piétiner les droits des salariés. Le moderniser, c’est au contraire l’inscrire dans le respect et la tradition de notre modèle social. Il faut donc que l’accès aux droits en sorte renforcé. En faisant apparaître de manière plus lisible et compréhensible quelques principes forts et intangibles. Tel est notamment l’objectif du projet de création d’un socle de droits fondamentaux, qui s’imposeront à tous les employeurs et constitueront des garanties connues de tous les salariés. L’élaboration de ce socle de droits sera confiée à une commission d’experts, dont la présidence a été confiée à Robert Badinter.

Ce n’est qu’à partir du travail qui en résultera, que pourra démarrer ensuite la réécriture du code du travail. Dans le même esprit, la loi continuera de garantir des grands principes généraux : le contrat à durée indéterminée, le salaire minimum et la durée légale du temps de travail.

Pour que cet immense chantier aboutisse, une attention toute particulière sera accordée au dialogue social, si difficile soit-il parfois dans notre pays. Le travail de concertation avec les partenaires sociaux et les organisations patronales a d’ores et déjà commencé. Il se poursuivra tout au long du processus de construction de cette réforme d’ampleur et pour chacune des grandes étapes de sa mise en œuvre.

La France ne peut demeurer à la lisière de toutes les évolutions sociales et sociétales qui la traversent, sans les comprendre ni les prendre en compte. Elle doit au contraire les intégrer en temps voulu, pour mieux répondre aux attentes et aux besoins des habitants de notre beau pays. La majorité élue en 2012 s’y emploie, comme jamais aucune autre n’a eu le courage de le faire auparavant.

mercredi 4 novembre 2015

A propos de l'autorité de l'Etat





Dans un entretien accordé au journal « Le Parisien » le 2 novembre dernier, Nicolas Sarkozy a choisi de s’exprimer sur la sécurité. Il est légitime et sain, dans une démocratie, que les formations politiques de l’opposition qui aspirent à gouverner, formalisent des propositions sur les questions majeures qui préoccupent les Français. C’est même plus utile que de se livrer à une critique systématique de l’action de la majorité. Il est cependant dommage que le président du parti qui s’est dénommé « Les républicains », dont le bilan en matière de sécurité a été marqué par les échecs que l’on sait, ne livre à cette occasion qu’un galimatias hargneux, qui semble davantage animé par un esprit de revanche que par un souci d’exactitude et de pertinence.

Amnésie sur les moyens de nos forces de l’ordre
Ainsi, après avoir lui-même lourdement contribué à l’appauvrissement considérable du ministère de l’Intérieur en supprimant 13 700 postes de policiers et de gendarmes de 2007 à 2012, Nicolas Sarkozy explique aujourd’hui qu’il conviendrait de recourir aux heures supplémentaires. Les intéressés, qui en ont déjà accumulé des milliers et dont les représentants ont tous exprimé récemment leur fatigue bien compréhensive au président de la République, apprécieront ! Pour notre part, nous préférons poursuivre le mouvement engagé dès 2012, conformément aux engagements pris. C’est ainsi que nous remplaçons depuis trois ans chaque départ en retraite. Nous créons de nouveau 500 postes supplémentaires pour les deux forces chaque année. Pour corriger le dramatique affaiblissement du renseignement territorial du débat des années 2000, nous déclinons le plan pluriannuel de mise en place de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), qui représente 432 créations nettes d’emplois de tous statuts. Pour faire face à l’augmentation de la menace terroriste, nous avons ajouté à cette réorientation des politiques publiques en direction de la sécurité 1 404 emplois nouveaux, dont 1 100 pour renforcer les différentes composantes du renseignement intérieur.

Confusion sur les missions des policiers et des gendarmes

Nicolas Sarkozy propose aussi le recentrage des missions des policiers et des gendarmes. Sur ce point, il plagie nombre des propositions que j’ai formulées dans le rapport que je viens de présenter à l’occasion de l’examen du projet de budget 2016 pour la sécurité. A ceci près que je ne propose pas de confier la sécurité routière des autoroutes aux sociétés privées concessionnaires. Pour ma part, je considère qu’il n’y a pas de « petit » enjeu de sécurité, qui justifierait que l’Etat s’en désengage. C’est en particulier le cas de la sécurité routière, qui constitue une priorité du gouvernement. 26 mesures ont été annoncées en ce sens le 26 janvier 2015, complétées par 22 autres le 2 octobre dernier, avec l’objectif de passer sous la barre des 2 000 morts annuels sur les routes à l’horizon 2020. Sur la question du recentrage des missions des forces de l’ordre, à ce point près, Nicolas Sarkozy n’avance rien de nouveau par rapport à ce que le président de la République François Hollande a demandé le 22 octobre dernier au ministre de l’Intérieur : formuler des propositions très concrètes d’ici à la fin de l’année, pour une meilleure articulation de l’intervention des forces de l’ordre avec les polices municipales et les acteurs de la sécurité privée.

Omissions sur la lutte contre le terrorisme

Afin de lutter  contre le terrorisme, Nicolas Sarkozy propose de ne pas laisser revenir les étrangers partis faire le djahad et d’incarcérer les Français qui en reviennent. Nous n’avons pas attendu ces suggestions tardives pour agir ! Emprisonner les Français qui reviennent était juridiquement impossible lorsqu’il était chef de l’Etat. Le droit le permet depuis la première loi de lutte contre le terrorisme que nous avons votée et qui est en vigueur depuis le 21 décembre 2012. A ce titre, 133 personnes ont d’ores et déjà été mises en examen et incarcérées. Prévoir d’incarcérer systématiquement un citoyen au seul motif de s’être rendu sur un théâtre de guerre est en revanche contraire à tous les principes qui garantissent l’exercice de la justice dans un Etat de droit. En amont, plutôt que de laisser nos ressortissants quitter la France, le gouvernement entend surtout empêcher les départs et s’est donné les moyens de le faire. C’est un des objets de la deuxième loi de lutte contre le terrorisme que nous avons votée et qui est en vigueur depuis le 13 novembre 2014. L’interdiction de sortie de territoire créée à cette occasion a déjà été appliquée à 190 individus. S’agissant des étrangers résidant en France, cette même loi a créé l’interdiction administrative du territoire, qui a fait l’objet de 55 arrêtés en moins d’un an. En outre, contrairement à l’opposition lorsqu’elle était aux responsabilités, le gouvernement n’hésite pas à utiliser l’ensemble des dispositifs à sa disposition, en recourant également à la déchéance de la nationalité à l’encontre des binationaux condamnés pour des actes de terrorisme (comme l’a indiqué le ministre de l’Intérieur, en réponse à la question d’actualité que je lui ai posée sur ce sujet le 6 octobre dernier) et en procédant à l’expulsion des étrangers qui constituent une menace pour l’ordre public sur le territoire national. Nicolas Sarkozy propose enfin de créer un délit de consultation des sites internet à caractère terroriste. Il feint de méconnaître que le Conseil d’Etat a jugé cette mesure contraire aux principes constitutionnels. Il oublie de rappeler que nous avons fait de la consultation régulière de ces sites un des critères permettant de manifester le délit d’entreprise individuelle à caractère terroriste dans la loi du 13 novembre 2014. Il ne dit pas que c’est cette majorité, dans le même texte, qui a rendu possible le blocage et le déréférencement des sites qui font l’apologie du terrorisme. Il est muet sur le fait que lorsqu’il était aux responsabilités, avait bien fait adopter une loi permettant le blocage des seuls sites à caractère pédopornographique, mais sans jamais avoir mis en œuvre les décrets d’application. Là encore, c’est nous qui nous en sommes chargés, après 2012.

Manque de rigueur sur la légitime défense

Nicolas Sarkozy considère que des policiers confrontés à un délinquant muni d’une arme de poing et refusant de la baisser, devraient être autorisés à faire usage de leur arme de service, sans attendre qu’ils se soient fait tirer dessus. Contrairement à ce qu’il indique, il n’est pourtant pas nécessaire qu’un délinquant ait ouvert le feu pour qu’ils soient autorisés à riposter. L’article 122-5 du code pénal dispose en effet que dès lors qu’une arme, dont il est permis de penser qu’elle a l’apparence d’une vraie arme, est dirigée vers des policiers et qu’ils se considèrent exposés à un risque pour leur vie, ils peuvent ouvrir le feu dans la mesure où leur riposte est strictement nécessaire pour faire cesser l’attaque. Cette question de la légitime défense demeure, pour autant, au cœur des préoccupations du gouvernement. C’est pourquoi le ministère de l’Intérieur travaille actuellement à la création d’un nouveau fait justificatif propre aux forces de l’ordre, permettant de neutraliser un individu armé. Un groupe de travail piloté par les inspections de la police et de la gendarmerie, auquel sont associés des parlementaires de gauche comme de droite, étudie la possibilité de faire évoluer les textes. Mais cette évolution exige à la fois du pragmatisme, de la rigueur et une analyse juridique fine. Il convient en effet de peser toutes les situations concrètes auxquelles sont confrontées les forces de sécurité intérieure, en tenant compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) et de la Cour de cassation. Bref, il s’agit d’une démarche sérieuse, à des années-lumière des formules à l’emporte-pièce dont Nicolas Sarkozy est coutumier.

« La ligne rouge qu’aucun républicain ne peut franchir »
Nicolas Sarkozy propose le rattachement de l’administration pénitentiaire au ministère de l’Intérieur. Christian Estrosi et Xavier Bertrand vont même plus loin, en suggérant l’absorption du ministère de la Justice tout entier dans un grand ministère de l’Intérieur. La modernité n’est pas la marque de cette proposition, puisque l’administration pénitentiaire a été rattachée au ministère de l’Intérieur avant 1911 puis, brièvement, sous le régime de Vichy. L’opposition fait une nouvelle fois-là, preuve de son simplisme sur ces sujets, en concevant la prison comme une oubliette. N’étant pas à un paradoxe près, elle avait au début du quinquennat précédent instauré les peines planchers, sensées remplir les centres de détention, avant d’élargir les conditions d’aménagement de peine deux ans plus tard, ce qui était de nature à plutôt les vider ! Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy oublie que l’individualisation de la peine et la préparation de la réinsertion sont des principes à valeur constitutionnelle qui supposent la séparation des pouvoirs ; que les règles de détention sont soumises à des normes de droit européen, qui imposent de distinguer la détention des autres formes d’enfermement, comme la rétention administrative ou l’internement. Quel que soit le rattachement ministériel de l’administration pénitentiaire, il faudra donc toujours un juge indépendant pour prononcer l’incarcération, il existera toujours un juge pour décider d’un éventuel aménagement des peines, de sorte que les espoirs de MM. Sarkozy, Estrosi ou Bertrand s’en trouveront probablement déçus. Tel est d’ailleurs le sentiment de François Fillon, qui n’a pas hésité à affirmer que la séparation entre justice et intérieur était « une ligne rouge qu’aucun républicain ne peut franchir ».

Absence de retenue dans le commentaire des faits divers
Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, s’est distingué, il y a précisément dix ans, par ses invectives au Kärcher, suivies quelques jours plus tard par les violences urbaines les plus graves que la France ait connues. S’il l’occulte aujourd’hui, le député de Clichy-sous-Bois et Montfermeil que je suis ne peut oublier son attitude de l’époque. Et ce seul souvenir, auquel on pourrait ajouter bien d’autres épisodes, l’autorise mal à se faire aujourd’hui le commentateur de faits divers qui, pour regrettables qu’ils soient, demeurent sans commune mesure avec cet épisode dramatique. Rappelons, en outre, que les auteurs des exactions commises lors du Comité central d’entreprise d’Air France ont été mis en cause dans le cadre d’une procédure judiciaire moins d’une semaine après les faits. Que les forces de sécurité ont repris le contrôle de la situation à Moirans deux heures seulement après leur engagement, décidé et mis en œuvre sans délai. Que le professionnalisme des forces de l’ordre, tant à Moirans que sur l’autoroute A1 à la fin du mois d'août dernier, a permis d’éviter la propagation des violences et qu’aucune victime n’a été déplorée, en dépit de la virulence des auteurs des exactions, qui sont ou seront identifiés et devront répondre de leurs actes devant la justice, au terme des enquêtes conduites sous l’autorité des parquets. Je suis également surpris que Nicolas Sarkozy ait choisi de revenir sur l’affaire de Tarnac, pour étayer son éloge de l’autorité de l’Etat. Chacun se souvient, en effet, des résultats désastreux de l’immixtion de l’exécutif de l’époque, dans cette affaire judiciaire. Il existe sans doute des manières plus convaincantes, pour revendiquer l’autorité de l’Etat, que de se glorifier d’une pantalonnade !

Chacun jugera, à la lecture des éléments factuels de cet article, inhabituellement long pour mon blog, de la crédibilité et de la pertinence des propositions de Nicolas Sarkozy en matière de sécurité. Pour ma part, je poursuis sans tapage, mais avec constance, rigueur et détermination, le travail que j’ai entrepris sur ces questions, depuis mon élection à l’Assemblée nationale en juin 2012, afin d'aider le gouvernement à restaurer partout l'autorité de l'Etat.

jeudi 29 octobre 2015

Oui à la généralisation des caméras-piétons





Il y a dix ans, deux adolescents étaient injustement arrachés à la vie à Clichy-sous-Bois. Cet événement tragique a marqué la mémoire collective de notre territoire. Il a aussi, durant plusieurs semaines, secoué la Nation tout entière.

Dix ans après, nombre de commentateurs s'interrogent sur ce qui a changé. Beaucoup de choses ont changé, mais pas encore assez.

Beaucoup, car, pour ne m’en tenir qu’à l’exemple de Clichy-sous-Bois, c’est avant tout la physionomie de la ville qui a été modifiée en profondeur, avec la mise en œuvre du projet de renouvellement urbain. Des écoles neuves ont été inaugurées, un collège a été reconstruit, la réforme de l’éducation prioritaire a apporté des moyens supplémentaires, un commissariat a été implanté, une agence de Pôle emploi a ouvert ses portes sur le plateau, la ville dispose -enfin- depuis quelques semaines d’une piscine, avant d’être desservie d’ici quelques années par le Grand Paris Express, au pied duquel une résidence d’artistes inspirée de la villa Médicis sera installée… Quant au quartier du Chêne-Pointu, sa requalification en profondeur vient d’être prise en compte par l’Etat.

Doit-on pour autant considérer que ces investissement massifs de l'Etat et des collectivités territoriales suffisent ? A titre personnel, je ne le pense pas. Et ce n’est pas non plus l’avis du gouvernement, qui a manifesté sa volonté d’amplifier le programme d’actions menées en direction de ces territoires qui ont concentré toutes les difficultés, à force d’avoir si longtemps été abandonnés.

Tel est le sens des annonces faites par le Premier Manuel Valls, lundi dernier, à l’occasion de la tenue du deuxième Comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté, chargé depuis sa création il y a huit mois, de proposer des mesures de nature à casser les logiques de ségrégation, tout en luttant contre les discriminations. Il ne s’agissait pas d’annoncer un de ces fameux plans Marshall illusoire que certains continuent d'appeler de leurs vœux par réflexe, mais de continuer de mettre en place des actions simples, de bon sens, aux effets concrets, de nature à traduire partout la République en actes.

En matière de logement par exemple, il est normal que l’Etat se donne les moyens de faire appliquer une loi votée il y a quinze ans et que certains maires se font gloire de ne pas respecter.

S’agissant de l’accès de tous aux emplois publics, un programme de renouvellement des origines sociales des élèves des 75 écoles administratives sera mis en œuvre et des parcours d’excellence dans les collèges situés en zones prioritaires (REP+) seront mis sur pied.

Enfin, sur un sujet sur lequel je travaille tout spécialement, si la sécurité est une nécessité pour tous nos quartiers, la qualité de la relation police-population est essentielle afin de faire vivre cette sécurité que chacun appelle de ses voeux.

Le Premier ministre a annoncé que les caméras-piétons, qui équipent certains policiers en intervention, seront progressivement généralisées à toutes les patrouilles. Je m'en réjouis. En effet, à l’occasion des différentes auditions que j’ai pu conduire ces dernières semaines en tant que rapporteur des crédits de la mission « sécurités » du projet de loi de finances pour 2016, j’ai pu constater que ce dispositif expérimental -qui suscitait au départ bien des inquiétudes notamment chez les forces de l’ordre- est aujourd’hui très largement plébiscité.

Les caméras-piétons constituent en effet une sécurité pour les fonctionnaires sur le terrain, en même temps qu’une garantie de respect pour tous les citoyens.

Je le dis sans ambages, je considère que mettre cet outil au service de l’amélioration des relations entre la police et la population sera bien plus efficace que d’autres dispositifs, imaginés un temps pour prévenir les discriminations et les contrôles au faciès.

vendredi 23 octobre 2015

Redresser la France, c'est aussi simplifier notre procédure pénale




Il est un constat partagé de longue date et qui inquiète, s’agissant des procédures de notre droit pénal : l’empilement des textes successifs, associé aux contraintes générales du droit de l’Union européenne, ont généré durant les vingt dernières années un formalisme excessif préjudiciable à l’efficacité et à la réactivité de toute la chaîne de répression des infractions.

Ces difficultés compliquent le travail -déjà difficile- des policiers et des gendarmes, soumis à une kyrielle d’obligations procédurières chronophages, qui les détournent du cœur de leur métier, au détriment de la présence sur le terrain et de l’intervention opérationnelle. Tous les responsables, toutes les organisations syndicales que j’auditionne chaque année en tant que rapporteur des crédits de la mission « sécurités » du budget de l’Etat sont unanimes pour déplorer les conséquences néfastes de ce formalisme, qui ne constitue en rien une garantie de droits supplémentaires pour les mis en cause.

Afin de contribuer à la restauration de l'autorité de l'Etat, alors que nos forces sont mobilisées avec une intensité nouvelle au service de la protection des Français depuis le début de cette année, le gouvernement a décidé de proposer rapidement des évolutions. Des mesures concrètes, issues du travail confié à des magistrats depuis mars 2014 par la Garde des Sceaux en lien avec le ministre de l’Intérieur, ont été annoncées la semaine passée par le Premier ministre. Elles répondent à un double objectif : simplifier la procédure pénale en profondeur, sans affaiblir les droits et libertés qu’elle garantit aux justiciables.

Ces changements concerneront tout d’abord l’assouplissement de la gestion de la garde-à-vue -revendication majeure des enquêteurs- par la mise en place d’outils nouveaux permettant de les décharger de certains actes fastidieux. Au-delà de la seule garde-à-vue, tout le formalisme procédural de l’enquête de police judiciaire sera revu et allégé, en l’adaptant notamment au degré de gravité des affaires traitées. A titre d’exemple, la règle du code de procédure pénale selon laquelle tout acte de procédure doit donner lieu à un procès-verbal séparé, sera supprimée. Les conditions d’accès à certaines données utiles à l’enquête, qui répondent aujourd’hui à une procédure très contraignante, exigeant un accord préalable écrit du magistrat, seront aussi facilitées. Enfin, les modalités de travail et d’échanges entre les magistrats et les officiers de police judiciaire seront modernisées. Il s’agit là de mesures simples et de bon sens. Elles constitueront un réel progrès pour le travail de ceux qui doivent appliquer la procédure pénale au quotidien, sans trahir les principes de notre Etat de droit.

Lors de l’examen en commission des crédits de la mission « justice » du projet de loi de finances pour 2016, le 21 octobre dernier, j’ai souhaité saluer l’importance de ces annonces attendues depuis longtemps et interroger Christiane Taubira sur leur calendrier de mise en œuvre. Je me réjouis qu’elle ait confirmé, dans sa réponse, que les dispositions relevant du seul gouvernement seraient concrétisées très rapidement, au cours des prochaines semaines et que celles qui nécessitent des modifications législatives feraient l’objet d’un projet de loi finalisé d’ici au printemps 2016. J’y serai naturellement très attentif.

Dans ce domaine, comme dans tant d’autres, pendant que les commentateurs commentent et si souvent dénigrent, le gouvernement et la majorité qui le soutient agissent pour mettre en oeuvre le changement, comme jamais cela n'a été fait auparavant.